Journal de Bord Éternel, Psithurisme Nostalgique

Deux heures sans téléphone en 2022.

Mardi dernier, j’avais rendez-vous pour faire changer la batterie de mon téléphone à l’Apple Store des Champs-Élysées. C’était également l’occasion pour moi de faire l’une de mes fameuses virées shopping qui finissent en pieds défoncés par la marche et sacs chargés de nouvelles choses dont j’avais forcément absolument besoin… ou pas.

Mon rendez-vous était à 11h25. Et j’ai été prévenu à la fin de l’entretien que mon téléphone serait disponible à 13h30. Deux heures sans téléphone ? Une broutille.

Pensais-je.

Au sortir de l’Apple Store, direction la Fnac. Le disque dur externe qui me servait de coffre-fort et de boîte à souvenirs m’a laissé tomber. Moi et tout ce qu’il contenait. Aux oubliettes ! Il m’en fallait donc un nouveau.

Sur le chemin, une interrogation. Mais c’est quoi déjà le code de ma carte bleue ? Et quand l’avais-je tapé pour la dernière fois ?

Le Code de Carte Bleue.

Eh oui. Tout le problème du service Apple Pay m’explosait à la tête. Payer avec son téléphone sans sortir sa carte c’est pratique. Trop pratique. La contrepartie ? L’oubli probable du code.

Pour ne pas m’humilier à la Fnac, je décidai de faire une tentative d’achat par carte, avec le code, pour un coca. Alors pour celleux qui derrière leur écran seraient tentés de me hurler dessus que l’on n’utilise pas sa carte pour un aussi petit montant, le coca en bouteille de 50cl est à 3€50 sur les Champs-Élysées.

Oui, il faudrait réellement un Grenelle des prix en lieux touristiques.

Arrivé à la caisse, goutte de sueur sur le front, tapotement fébrile sur le pavé numérique. CODE BON. Merci Déesse.

La Carte de Fidélité.

À la Fnac, choix du disque dur plutôt simple. Et si j’en profitais pour me prendre les Mangas qui sont sur ma liste ?

Et en direction du rayon manga très sommaire de la Fnac des Champs, pause. Stop. Problème.

Ma carte de fidélité de la Fnac est dans mon téléphone. Et ça me fait un peu chi*r de ne pas l’utiliser sur les livres. Non pas que la réduction qu’elle offre sur les Livres me permette de rembourser le coca dispendieux, mais quand même.

Je m’interroge. Il n’est que midi, ce serait cool d’avoir un livre pour patienter. Hop ! Allons chercher ces tomes manquants et tant pis pour la carte de fidélité. Mais il n’y a rien, rien de rien. Et je me dirige en caisse avec le disque dur uniquement en me disant qu’au moins je n’aurais pas perdu une occasion de l’utiliser.

Mais la jeune fille en caisse me proposera quand même de retrouver mon compte sur son ordi. Ah la technologie…

L’Appareil Photo.

Déambuler dans Paris. C’est un peu mon sport préféré. Je m’offre très souvent de longues balades ponctuées de pauses photos – qui ne me serviront le plus souvent à rien, sauf à remplir ce téléphone qui me fait l’effet d’être gavé comme une oie.

Et justement. En descendant les Champs, je découvre la nouvelle boutique Lacoste, en lieu et place de l’ancien cinéma Gaumont Ambassade fermé en 2016. Jolie façade que je souhaitais immortaliser… foutre en story Instagram pour je ne sais quelle raison. Mais ?

Mais je n’ai pas mon téléphone/appareil photo. Décidément, ce téléphone c’est un putain de couteau suisse. Si tu ne l’as plus, tu n’as plus rien. Et c’est pour cela qu’aujourd’hui, on peut se permettre de porter des sacs-bananes et plus nos sacs à dos quand on part en vadrouille. On a juste à y mettre le téléphone et c’est bon, on a tout.

Allez, on continue son chemin et on regarde avec les yeux.

La Musique.

Le plus souvent quand je marche… parade dans Paris, je le fais avec mes écouteurs aux oreilles. Si j’écoute parfois de la musique, je les utilise surtout comme barrière pour me couper du monde, atténuer les bruits, dissuader les gens de m’approcher et me permettre de me laisser-aller à penser et changer le monde.

Mes écouteurs me permettent de créer cette bulle qui m’est nécessaire pour me retrouver avec Moi et simplement Moi au milieu de la foule.

Aujourd’hui, j’aurais pu les utiliser juste pour écouter de la musique mais… pas de musique sans téléphone. Et comme je n’ai pas trouvé mon petit iPod avant de partir de la maison, ma musique du jour sera la circulation automobile !

Il nous reste un peu plus d’une heure. Et si nous marchions jusqu’à la Fnac des Halles – maintenant que je sais que j’ai le bon code de carte et qu’ils peuvent retrouver ma carte de fidélité – ? Et achetons ces mangas !

Le podomètre.

Je marche beaucoup. Tout le temps. Toujours. Je prends très rarement le métro dans Paris parce que j’adore marcher avant de récupérer le métro qui m’amènera dans ma banlieue. Je repousse toujours un maximum le moment où je vais devoir rejoindre une station pour finir mon trajet.

Et j’adore voir grimper le nombre de pas sur l’application Santé. J’ai décidé il y a quelques mois d’arrêter de me servir de ma montre connectée parce qu’en plus de ne pas vouloir recevoir de notifications sur mon poignet, je ne trouve pas les montres connectées jolies. Qu’elles soient carrées ou rondes, cet écran noir a fini par me déplaire. J’y vois une homogénéisation de l’objet qui me rappelle ces threads sur Twitter sur la catastrophe qu’est le minimalisme en urbanisme.

Mais sans téléphone ou sans montre pour calculer mes pas, j’ai fait le choix complètement stupide, barré et comique… de prendre le métro. Avec cette phrase en tête : « je n’ai pas envie de marcher gratuitement ».

Je crois que c’est à peu près comme ça que s’éteindra notre civilisation dans cent ans. L’Idiocracy. Un jour on oubliera que l’on peut marcher sans podomètre.

J’ai assumé ce choix d’autant plus que je savais qu’une fois mon téléphone en main, j’allais refaire cet exact même trajet à pieds pour retourner sur Châtelet et surtout parce qu’il ne me restait qu’une heure maintenant. Un peu trop juste.

Oui, j’essaie de me justifier parce que très clairement, tout ce que je raconte est honteux.

Pas de distraction pour le trajet en métro.

Assis dans le métro, habituellement, je m’occupe avec une partie de Mario Kart ou quelques minutes de Duolingo. Je me souviens que plus jeune, je me servais de ces trajets pour laisser vagabonder mon imagination et créer des histoires dans ma tête. Mais ma Bibliothèque cérébrale est tellement pleine de fables que je ne sais plus où se trouve la réalité parfois.

Là, fixant l’infographie du trajet, j’avoue que je ne sais plus du tout à quoi j’ai pu penser hormis que le monsieur en face de moi était mignon et, comme toujours à Louvre-Rivoli, à ma rencontre avec l’Homme à la Bouteille en 2007 – oui, mon cerveau est une machine à voyager dans le temps fabuleuse.

Je n’ai finalement trouvé que deux livres à la Fnac des Halles et bien évidemment, aux caisses automatiques il n’était pas possible de rechercher un compte. J’accepte ce retour de bâton céleste pour toutes les inepties que j’ai pu raconter sur ce début de journée et sur l’image déplorable que je suis en train de donner de moi.

Le retour du téléphone prodigue.

De retour à l’Apple Store, j’ai pu récupérer mon téléphone, cet objet incroyable et fabuleux, magique et envoûtant. Responsable du futur arrêt de l’évolution humaine… Et à la nouvelle batterie presque vide.

Cette journée se fera donc sans lui. Juste moi. Et contrairement à ce que j’ai pu vous laisser croire, cela me va parfaitement.

Il est un peu après 13h30 et ma véritable journée va commencer. Téléphone en poche. Écouteurs dans les oreilles sans musique. Zéro notification. Je me lance dans ma grande marche-shopping habituelle. Seul avec moi-même, je ferai 15000 pas avant de rentrer à la maison.

J’irai des Champs-Élysées à Châtelet en passant par le Jardin des Tuileries. Je passerai chez Vans Beaubourg pour voir de près cette collection Sailor Moon qui coûte un saladier. Je marcherai jusqu’à la boutique de Carre’y qui sponsorise Drag Race France pour me prendre de nouvelles boucles d’oreilles. Puis cette supérette japonaise que j’aime bien pour une petite canette de soda Sailor Jupiter.

Et je rejoindrai Saint-Lazare pour rentrer à la maison.

Comme toujours, je passerai dans des coins où me sont arrivés mille merveilles et coeurs brisés. J’y repenserai avec le sourire en me disant qu’il faudrait que je créée enfin cette carte de mes souvenirs dans Paris.

Et je me rappellerai de 2007. Lorsque dans mon sac, je trimballais mon téléphone qui n’était pas encore intelligent, mon appareil photo numérique, mon lecteur mp3, un carnet de dessin, un pez Hello Kitty et mon portefeuille à scratch.

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