Journal de Bord Éternel

Kévin Bacon, Les Garçons, Psithurisme Nostalgique

M09 – Peut-on s’enlacer et voir qui bandera en premier ?

Dans les faits, c’est un jeu qui peut être amusant. On s’enlace et on voit qui réagit en premier. Cela pourrait même remplacer le jeu de la bouteille qui tourne. Ou celui dans lequel on doit s’enfermer à deux dans un placard pendant que d’autres chronomètrent.

Mais en réalité, c’est un cauchemar pour moi.

Je fais partie des garçons à l’érection facile. Ce qui pourrait être vu comme quelque chose de positif, m’a cependant conduit, moi, à complexer et à redouter toute interaction avec un garçon qui n’est pas mon petit copain.

J’ai toujours été comme ça. Une machine à érection. Ma vie est faite de moments quelconques – comprendre simples accolades amicales, où j’ai enlacé des garçons et réagi. Alors qu’eux, non. Et cela m’a très tôt amené à considérer que c’était anormal et gênant. A éviter, donc.

C’est pourquoi, alors qu’il y a encore quelques années j’étais du style très câlin, j’ai fini par limiter mes interactions physiques rapprochées à Kévin Bacon et je suis devenu une pierre avec les autres garçons. Repoussant autant que possible toute proximité.

Quand bien même il s’agissait d’une réaction naturelle, d’un réflexe mécanique ou d’un manque de concentration, je ne pouvais plus laisser mon corps me trahir.

Comme pour mes émotions que je tente de toujours maîtriser, le control freak que je suis a décidé que je ne devais plus jamais me faire avoir par mon corps.

Notamment quand certains garçons jouent au jeu du Enlaçons-nous pour voir qui bandera en premier sans te prévenir. Tu penses innocemment que le garçon n’y a pas prêté attention ou qu’il ne s’est pas imaginé des trucs.

Jusqu’au détour d’une conversation ou d’un message, où il te le rappelle quelques fois longtemps après. Et tu comprends que tu t’étais fait avoir.

L’un d’entre eux m’avait d’ailleurs carrément envoyé ce meme avec comme message « tu te rappelles ? ».

Et je me demande du coup qui est le plus vicieux des deux. Celui qui ne contrôle pas son érection ou celui qui avait une idée derrière la tête.

Je n’ai jamais joué à ce jeu.

Mais je me souviens néanmoins qu’une fois c’était arrivé à quelqu’un d’autre qu’à moi. Un ami encore plus control freak.

Juste après ma dernière rupture. Il m’avait proposé de dormir chez lui. Alors qu’il était dans mon dos, à me consoler, j’avais pu le sentir. Gêné, Il s’était rapidement excusé.

Mais, moi. J’étais tellement content.

C’était la première fois que cela arrivait à quelqu’un d’autre qu’à moi depuis ce moment. (petits amis exclus) Et ça m’avait rassuré.

Je n’étais pas le seul.

Les Garçons, Mélancolie Apocalypse

M08 – Cela fait mal, jusqu’à ce que cela s’arrête.

S’il n’y avait qu’un conseil. Qu’une formule magique à retenir. Pour se remettre d’une rupture. Je dirais que c’est bien celle-ci.

Cela fait mal jusqu’à ce que cela s’arrête (de faire mal).

Mais comme pour tout. C’est malheureusement l’expérience qui permet de l’apprendre. Au préalable, il faudra donc bien morfler une ou deux fois. Voire plus.

Comme j’ai appris à enfouir mes émotions au fin fond de mon corps, mon coeur brisé à moi me faisait mal… à l’estomac. Et j’ai fini par l’appeler Ulrich. Il avait été jusqu’à me faire perdre 8 kilos en pratiquement deux semaines juste après Jolies Lèvres, tout en m’obligeant à manger sans cesse pour ne pas avoir mal.

J’ai compris plus tard que moi je ne développais pas un Coeur brisé mais un Ulcère.

Un jour. Tout en me jetant sur un carré de kiri pour faire taire Ulrich – le kiri ça soigne tout. Je me suis dit qu’il fallait que j’accepte la situation. Je m’étais fait larguer. C’était normal d’avoir mal.

Et, à partir de ce moment-là, dès que je sentais monter la tristesse, je disais haut et fort « J’accepte ! ».

C’est devenu ma formule. J’accepte.

J’ai alors commencé à la prêcher ça et là. Mais j’oubliais une chose. On aime avoir mal. Gratter sa croute. Se lamenter. Et par moments, avoir des comportements borderline.

Et à chaque fois, on m’a répondu la même chose. « J’ai besoin de bien me ramasser pour aller mieux » ou « non mais moi je dois toujours passer par une spirale d’auto-destruction pour me remettre ».

Alors je me suis dit qu’il était peut-être inévitable de souffrir. Et je me suis demandé.

Après une rupture, doit-on souffrir autant que l’on a été heureux pour rééquilibrer la balance cosmique de l’Amour ? Et sur la grande horloge du coeur en miettes, un jour de bonheur avec Lui deviendra combien de jours de tristesse après Lui ?

Y a-t-il seulement un timing universel… Je ne le pense pas. Cela fait mal jusqu’à ce que cela s’arrête. C’est certainement le parfait mantra.

Une véritable leçon de vie.
Faîtes passer le message.

Psithurisme Nostalgique

M07 – Rien à se mettre.

Une armoire pleine à craquer. Des tiroirs qui débordent. Une penderie qui s’écroule sous le poids des manteaux. Des fringues partout dans l’appart. Plein de couleurs. De coupes différentes. De styles différents.

Mais. Rien à se mettre.

Un jour, j’ai ouvert le placard de C. Il y avait 4 chemises. Deux pantalons. Deux paires de chaussures. Deux pulls. Le tout dans des couleurs neutres. Du blanc. Du noir. Du gris. Du bleu marine. Et du marron.

J’avais été choqué. Un placard de tueur en série.

Mais il était toujours beau et élégant. Sans faux pas. En musique, on aurait dit qu’il était juste. Et, qu’à l’inverse. Moi. Je pourrais « chanter » faux.

Des fois. J’ai cette envie. Celle d’attraper toutes mes affaires et de les soumettre à la méthode de Marie Kondo. Pour ne garder que celles qui provoquent une étincelle dans mon coeur.

Mais je sais depuis cette erreur que je ne dois surtout pas me laisser aller à une impulsion.

2020 a été une sacrée alliée en ce qui concerne ma frénésie de vêtements. Confiné, je n’avais aucun besoin ni envie de nouvelles choses – j’ai passé trois mois en sous-vêtements entre mars et juin puis à nouveau depuis fin septembre.

Egalement. Le fait que toutes les marques auxquelles j’étais habitué se trouvent sur la liste de celles qui exploitent les Ouighours. Un cas de conscience personnel sur l’impact de la Fast-Fashion sur l’écologie. Et une remise en cause naissante de ce besoin de « posséder ».

Tout cela m’a permis de freiner ma course au « j’achète ».

Il m’arrive encore de me faire plaisir mais c’est moindre qu’avant.

Je sais que le « Rien à se mettre » vient de l’amalgame très profond chez moi de deux facteurs aggravants. Le caractère « cigale » hérité de mon père qui s’achetait des vinyles en sortant du travail, et mon besoin lamentable d’être bien habillé pour compenser le fait que je me trouve quelconque.

Et l’on peut, je crois, également remercier Fran Fine qui n’a jamais mis deux fois la même tenue en six saisons.

Psithurisme Nostalgique

M06 – les dimanches devraient être passés au lit. A baiser toute la journée.

Je vois le dimanche comme une journée. D’intérieur. Où l’on aurait même pas à sortir du lit. La parfaite journée au chaud. Les jambes entrelacées. Nos mains se baladant. Mes pieds froids – ses pieds chauds. Petite et grande cuillère. A tour de rôle. Devant une série et un film. Et des snacks. Rien d’élaboré. Du gras – du sucre.

Et où chaque fois que l’on serait d’humeur. Au moins une fois par heure… On irait se faire du bien et un peu de ce mal qui fait du bien.

On pourrait se chercher. Se masser. Juste se frotter. Y aller franco. S’allumer. Ou se monter en l’air.

On pourrait se réveiller. De cette troisième sieste. Et avoir envie de se mélanger. De se dégourdir.

On pourrait se regarder tout de suite après. Et se dire « encore ». Ou terminer cet épisode puis se dire « encore ». Ou terminer cet épisode pendant le « encore ».

On pourrait ne rien se dire. Et céder sur une pulsion. Parce qu’on la sent pointer. L’autre. Ou la pulsion.

On pourrait se fatiguer. Pour évacuer. Se relâcher. Se détendre. Et reprendre.

On pourrait parce que c’est dimanche. Et que les dimanches sont faits pour être passés au lit. A baiser toute la journée.

Le Garçon aux Pieds Nus, Psithurisme Nostalgique

M03 – c’est étrange de se dire que l’on a le même âge que ces gens vieux.

38 ans. Hier.

Est-ce que c’est bizarre de se dire que l’on a le même âge que des gens vieux ? Ou est ce que c’est normal de penser que je suis plus jeune, tout en ayant le même âge que des gens vieux ?

Même si la photo prise en Septembre sur la colonne à gauche me montre sous mon meilleur jour; mon corps a morflé. Mes cheveux ont péri. Et ma barbe s’est parée de blanc. Mais j’accepte cette évolution.

Vieillir physiquement ne m’ennuie pas. Je n’avais jamais réellement compté sur mon physique de toute façon. Remerciements : les gens qui ont passé mon adolescence à dire à mes frères qu’ils étaient beaux et moi, « gentil ».

Non moi, j’avais juste peur de devoir perdre avec l’âge mon côté loufoque et gamin. Je voyais cela comme une issue inévitable.

Vieillir cela signifiait être sérieux et responsable. Gris.

A mon âge. Mon Père était déjà marié. Il avait même déjà plusieurs enfants – je suis issu d’un second mariage quelques années plus tard dans sa vie. C’était un adulte avec un travail. Il portait un costume du lundi au vendredi. Il conduisait. Il était moustachu-Magnum, cheveux impeccables. Barbe rasée de près tous les matins.

Pas une magical girl qui se saoule au coca, quoi, et qui n’attend qu’une chose : que le Tango rouvre pour aller danser.

Mais je ne souffre pas de cette comparaison. J’aime cela. Je suis suffisamment vieux de corps et d’esprit pour être serein dans ma vie. Et suffisamment jeune de bêtises et délires pour continuer à m’amuser. Serait-ce cela le stade daddy ?

Bon, je sais quand même qu’il me faudra quatre jours à me remettre d’une nuit blanche au Tango, que j’y croiserai des jeunes qui auraient pu être mes enfants et que là-bas je ne connaîtrai même pas un cinquième des chansons qui passeront, mais je suis prêt !

Je suis prêt.

Kévin Bacon, Les Garçons, Psithurisme Nostalgique

M02 – je souhaiterais ne porter que mes sous-vêtements et une couronne toute la journée.

Le 02 Décembre. C’est mon anniversaire. Et ce que j’aime, c’est me réserver cette journée à moi uniquement.

En temps normal, je me serais mis de repos aujourd’hui car je déteste y travailler. Là je n’en ai pas eu besoin puisque Covid-sama a décidé que je n’avais plus de travail.

Mon programme était toujours le même. Ne rien faire. Rester en pyjama devant de vieilles séries. A manger du chocolat et à boire du coca.

Alors oui, rien de bien sexy. J’étais dans un pyjama en pilou-pilou, sous deux plaids et sans couronne. A l’opposé même de la définition du sexy. J’ai dû boire un litre de coca, du thé et finir une baguette de pain avec du kiri. Et je n’avais même pas de chocolat.

Comme toujours, aucun réseau social ne rappelle mon anniversaire. Alors, j’ai reçu très peu de messages et d’appels hormis ma famille, mes ami.es très proches, quelques ex-collègues et bien sûr Kévin Bacon.

Il fut un temps où cela avait une importance. Recevoir une tonne de messages. Et espérer en recevoir de qui vous savez. Les Garçons du passé. Mais après des années à être oublié – sans pathos aucun, je crois que je m’y suis habitué.

Je sais que pendant quelques heures je vais me dire que plus jamais je ne leur souhaiterai le leur mais le jour-même, je le ferai encore et toujours. Parce que c’est qui je suis. Et je me dirai que peut-être ils remarqueront qu’ils m’oublient chaque année.

J’ai maintenant 38 ans.
J’ai toujours mes pouvoirs magiques.
Et c’est tout ce qui compte.